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L'origine de la Quadragésime

Saint Jean de Saint-Denis

Saint Jérôme et saint Léon le Grand placent l'origine du carême de 40 jours, ou Grand Carême, dans la tradition apostolique.

La plupart des historiens modernes ne partagent pas l'opinion des deux docteurs de l'Eglise d'Occident. Ils considèrent que la pratique du jeûne quadragésimal n'apparaît qu'au IVe siècle. Les cadres de cet article ne se prêtent pas au développement et à la critique de cette thèse ; d'ailleurs même si le carême pré-pascal de 40 jours ne commence qu'au IVe siècle, cela ne change en rien le problème de sa véritable origine.

La source de telle ou telle coutume dans l'Eglise ne peut être uniquement saisie par une classification chronologique de quelques documents épars venant des temps passés ; sans parler de la vaste tradition non écrite, souvent silencieuse et pourtant vivante et tenace, difficilement saisissable par la critique historique et dans laquelle les vestiges palpables ne sont que des gouttes d'eau au sein de l'océan, les documents du Ier siècle eux-mêmes peuvent ne présenter qu'un intérêt accidentel dénué de valeur apostolique, cependant que certains, plus récents, témoigneront d'une tradition primitive.

Ne confondons pas les événements des temps apostoliques avec la tradition apostolique. Les pentecôtistes, par exemple, qui cherchent à revivre les charismes survenus après la descente du Saint-Esprit en reconstituant les temps apostoliques, ne sont pas enracinés dans la tradition, ils apparaissent comme un produit spécifique des temps modernes, se limitant à la Réforme du XVIe siècle.

La tradition apostolique, celle des Douze, n’est pas une date historique, mais la plénitude et l'accomplissement de la vraie tradition universelle.

La Quadragésime comme période de purification, de renouveau, d'épreuve, de lutte spirituelle, d'abstinence, précédant le jour de la révélation, de la nouvelle naissance, de la résurrection, plonge ses racines dans la tradition de l'humanité. En effet, elle est pratiquée aussi bien dans la Bible que dans les religions antiques. L'épreuve quadragésimale de l'âme après la mort que nous trouvons dans l'enseignement de l'Eglise orthodoxe, avec ses quarante messes pour le défunt, était connue des Egyptiens et des Orientaux. Les 40 jours du Christ ressuscité passés sur terre, avant son Ascension, scellent cette tradition. Les 40 jours de purification d'une mère, couronnés par la fête de la Sainte Rencontre, font partie des usages de plusieurs peuples. La durée de temps peut varier : 40 ans, 40 jours, 40 heures ou même 40 fois une prière, par exemple 40 fois : «Seigneur aie pitié !» dans les services orientaux, mais le nombre 40 ne varie pas, gardant toujours la même signification spirituelle précise.

Le Verbe divin nous parle maintes fois et sous des formes diverses de la préparation et de l’épreuve quadragésimale :

- 40 jours et 40 nuits, Dieu purifie et renouvelle le monde par les eaux du déluge avant de conclure alliance avec l'Eglise noachite (Gn 7, 12-17).

- 40 ans, le peuple d'Israël, dans sa marche vers la Terre Promise, est conduit par le Seigneur à travers le désert (Dt 2, 7 ; 39, 5) et nourri de la manne céleste (Ex 16, 33).

- 40 ans de plus, selon l'ordre de l'Eternel, le peuple révolté habitera le désert : «Vous porterez la peine de vos iniquités pendant 40 années, dit le Seigneur» (Nb 14, 33-34).

- 40 jours et 40 nuits, Moïse demeure sur la montagne sainte, loin des siens et près de Dieu, pour recevoir les Commandements (Ex 14, 18 ; 34, 28).

Le prophète Amos (2, 10), le prophète Néhémie (9, 21) et le Psalmiste (Ps 95, 10) commentent et rappellent les quarantaines de l'Exode.

- 40 jours et 40 nuits sans manger ni boire, Elie s'avance sur Horeb, la montagne de Dieu, vers la manifestation du Seigneur dans le murmure doux et subtil (1 R 19, 8).

«Encore 40 jours et Ninive sera détruite» proclame Jonas le prophète, obéissant au commandement de l'Ethernet, mais les gens de Ninive jeûnent, se revêtent de sacs et de cendres pendant 40 jours et Dieu pardonne (Jonas 3).

Tous ces textes sacrés et ces mystères quadragésimaux de l'Ancien Testament se joignent et se nouent dans les 40 jours de jeûne et de tentation au désert de Notre Seigneur Jésus-Christ (Mt 1, 13 ; Lc 4, 21).

Il est indispensable de noter ici que les 40 jours de jeûne du Christ, à l’opposé de la tradition universelle et des exemples bibliques, ne précèdent pas l'événement glorieux de son baptême et la manifestation de sa divinité, mais le suivent. Cette exception à la règle s'explique aisément. Les Noé, les Moïse, les Elie, Israël et les autres peuples sont des créatures pour lesquelles les 40 ans ou 40 jours représentent une montée vers Dieu par la purification et la pénitence. Dieu incarné, homme sans péché, n'a pas besoin de montée purificatrice, mais témoigne sa condescendance et son abaissement.

L'initiation et le baptême chrétiens reflètent fidèlement le baptême du Christ, non seulement par le geste d'immersion au nom de la Sainte Trinité, comme le veulent quelques-uns, mais par le contexte évangélique. La lutte avec le diable, le jeûne, le désert sont inséparables du baptême de Notre Seigneur et organiquement unis. Ainsi, dans le rite baptismal, nous retrouvons le triple renoncement à Satan et les exorcismes. Les catéchumènes des premiers siècles se préparaient pendant 40 jours par l'instruction et le jeûne à la solennité de leur baptême. Oui, le baptême chrétien reproduit en vérité celui du Christ comme dans un miroir, se conformant à la loi du reflet : fidèle et opposé. Le Christ est baptisé et jeûne, l'homme jeûne et est baptisé. Le Christ s'abaisse et l'homme monte. Le baptême reprend ici le rythme biblique : le jeûne et la lutte contre la tentation précèdent l'événement glorieux.

Primitivement, le carême quadragésimal était le temps de préparation des catéchumènes au baptême ; celui-ci se faisait le Samedi Saint, car le baptême est notre mort et notre résurrection en Christ (Ro 6, 34 ; Col 2, 12, 10, 2 ; Gal 3, 27).

Les cérémonies du Grand Carême expriment jusqu'à nos jours cette préparation, plus accentuée dans le rite occidental, plus estompée en Orient. Pourtant au Carême, l'Orient ajoute l'ecténie des «éclairés». Le rite émouvant de la bénédiction avec la lumière des fidèles prosternés pendant la messe des présanctifiés, accompagnée des paroles significatives : «La Lumière du Christ éclaire tout !», s'adresse, en premier lieu, à ceux qui s'instruisent dans la doctrine chrétienne avant le baptême.

Le service du Samedi Saint est autant le service solennel du baptême que les vigiles de la Résurrection du Christ. En effet, la lecture des 15 leçons dans le rite occidental se déroulait pendant que les néophytes entouraient le baptistère. En Orient, le chant de «Vous tous qui avez été baptisés en Christ, vous avez revêtu le Christ !» à la place du Trisagion, le changement d'ornements (ceci dans les deux rites), l'Evangile de Matthieu, chapitre 28 en entier et, en Occident, la bénédiction des fonts baptismaux et les collectes, pour ne citer que ces exemples, visent directement le baptême.

Jusqu'au IXe siècle, une série de conciles ordonnent ou conseillent de baptiser les enfants à Pâques et surtout le Samedi Saint. Le jeûne quadragésimal pré-pascal était bien dans l'Eglise primitive le jeûne des catéchumènes.

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